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Lettre Sebron 1856

Exceptionnel manuscrit d'Hyppolite SEBRON, collaborateur de Louis DAGUERRE lors de la réalisation du diorama....
Dans ce manuscrit H. SEBRON est très critique envers Daguerre qu'il accuse de s'être approprié la paternité de ses nombreuses toiles.
Il établit une liste des différents tableaux présentés au diorama.
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Note sur les travaux de Mr Hyppolite Sebron.

Ma carrière artistique commence par le décors.

Je travaillais à l'Ambigu Comique et à l'Opéra lorsque Daguerre créa le Diorama et vint me chercher. Je fus à partir de ce moment son collaborateur assidu mais anonyme.

Mr Daguerre est mort, ce n'est point le moment de récriminer contre lui, je ne l'ai pas fait durant sa vie. D'ailleurs Mr Daguerre qui me donnait des appointements croyait payer travail suffisamment (dans le texte), pour en faire légitimement son talent propre, et sa réputation. Sie su vos non vobis*, me fut appliqué dans toute sa rigueur. J'eus aussi, et aux mêmes titres et avantages de seconder dans ses travaux de peinture Mr Bouton l'associé de Mr Daguerre. Après 1830 Mr Bouton se retira du Diorama, Mr Daguerre restant seul propriétaire, me proposa, sinon une association du moins une collaboration en titre. Les notices du Diorama et les journaux du 20 octobre 1834 tels que le journal des travaux publics, le messager, le courrier français, et le courrier des théâtres, en font foi.

Il s'agissait alors de me retenir. Après divers travaux exécutés en Angleterre, on me faisait des offres avantageuses pour Londres. je préférai une ombre de gloire à Paris, à la fortune à l'étranger, j'étais très jeune je restai.

Ceci pour faire comprendre pourquoi j'insiste sur les détails de mon concours au Diorama et l'importance que j'y attache.

Ce fut alors, pour marquer cette époque et pour conquérir un peu cette réputation à laquelle je sacrifiais tout, que j'employai les ressources de mon expérience déjà grande, a combiner et perfectionner les tableaux Dioramiques à double effet. Le résultat fut: La vue du bassin du commerce à Gand, tableau représentant le jour et la nuit: l'Intérieur de St Étienne du Mont vu le jour et pendant la messe de minuit . L'effet du jour représentant l'église à peu près vide. Elle se peuplait d'une nombreuse foule pendant l'effet de nuit. Ce tableau ainsi que la Vallée de Goldau entièrement de moi: compte pour les plus grands succès du Diorama de Daguerre. Je crois pouvoir avancer qu'ils sont restés dans la mémoire de tous ceux qui les ont vus.

Pour ces tableaux transparents à double effet, auquels moi seul ai travaillé, que j'ai perfectionnés et dont moi seul ai le secret, le gouvernement donna une pension de 2000 francs à Mr Daguerre.

Après cette épreuve on conçoit la détermination que je pris de renoncer au genre Dioramique et de cesser ma collaboration au Diorama, qui d'ailleurs brûla bientôt après sans avoir produit de tableaux nouveaux.

En somme voici le bilan de mes travaux chez Mr Daguerre. Sur 30 tableaux de 65 pieds de long sur 40 de haut, exposés pendant la durée de son existence, 14 ont été entièrement peints par moi; il va sans dire, qu'en ma qualité de collaborateur, j'ai contribué à l'exécution des autres.

Je donne ici pour mémoire, la nomenclature de mes œuvres au Diorama.

En 1825

La vue de Brest.
La vallée de Chamonix.
Les Rochers du ST Gothart, Vues prises d'après nature et qui furent l'objet de voyages en Bretagne et en Suisse.
Le tableau du Déluge, d'après une composition de Daguerre.
L'Abbaye de Roslyn.
La Chapelle d'Holyrood.
Le Brouillard vu à travers un vestibule gothique. L'esquisse de 4 pieds peinte par moi fut vendue à Berlin et signée Daguerre.
Vue d’Édimbourg (clair de lune).
Le tombeau de Napoléon à St Hélène.
Une petite vue du grand canal de Venise.
La vue de Paris, prise de Montmartre.
En mai 1830 je fis un voyage en Italie, d’où je rapportai plus de 150 vues de villes et de monuments. Après quoi je repris mes travaux au Diorama en terminant la vue commencée de l'Hôtel de ville, épisode de la révolution de

1830.
C'est alors qu'eut lieu le voyage à Londres dont j'ai parlé, et où je peignis cinq grands tableaux Dioramiques pour un spéculateur anglais** qui les emporta en Amérique où il fit, en les exposant, une petite fortune.

1833
La vue du Bassin du Gand.
L'Intérieur de St Étienne du Mont.
La vallée de Goldeau. Tableaux transparents à double effet.
Malgré ces grands travaux aux Diorama de Paris et de Londres, je ne cessai jamais depuis 1825 d'exposer au Louvre des toiles qui presque toutes furent le fruit des voyages, dont j'ai toujours eu le goût et que j'ai toujours entrepris, sans mission du gouvernement et à mes frais, risques et périls, ces tableaux m'ont valu quelques notoriétés dans le genre d'intérieur.

Voici la liste des principaux.

La vue intérieur a la petite église de Charonne près Paris fut mon premier tableau- il fut acheté par un grand amateur Mr de Courty.
Intérieur de St Vandrille- acheté par Mr Guiton alors régent de la banque.
Intérieur de St Omer - chez Mr Dantan Jeune.
Vue de la ville prise du faubourg- a Gand chez un amateur
Un cloître (clair de lune)- Mr Lachat ex agent de change.
Un autre cloître même effet - Mr Gervais à Paris.

1840
Vue de la cathédrale d'Auch-a Bruxelles chez un amateur.
Intérieur de St Marc de Venise - ce tableau rapporté d'un second voyage en Italie fut acheté à Rotterdam, et m'a valut le titre de membre de l'académie de Rotterdam et d'Amsterdam.
Vue du port d'Amsterdam au lever de la Lune- appartient au bourgmestre de cette ville.

1841
cathédrale de Milan - acheté par le roi Louis Philippe.
même sujet - au banquier Balano Basabio de Milan.

1842
Souvenir de la Durance (paysage effet de clair de lune)- acheté par le roi Léopold a l'exposition de Bruxelles.
Intérieur de l'église de St Jacques d'Anvers- idem.
C'est à la suite de cette exposition que je fus décoré de l'ordre de Léopold de Belgique.

1844
Vue intérieur de la chapelle de Windsor, toile de 10 pieds sur 7,5 de haut-exposé au Louvre acheté par le roi Guillaume II.
Une somnambule dans un cloître ( effet de lune et de lampe) - acheté par le même souverain.

1845-1846
Voyage en Espagne et au Maroc.A mon retour le prince de Montpensier ayant demandé à voir mes cartons y choisit 12 aquarelles pour l'album de la duchesse, outre mes dessins je rapportai de ce voyage.
La mosquée de Cordoue.


Les rochers de Ronda.
La vue générale de Grenade.
Toiles exposées en 1847 et 1848.
A l'époque de la révolution de février j'avais à Neuilly dans la galerie du roi Louis Philippe 22 tableaux qui furent brûlés dans l'incendie du Château.
juillet 1848

La distribution des drapeaux à la Barrière de l'étoile (effet de soir-commandé par le gouvernement provisoire).
Deux tableaux Dioramiques de 40 pieds, épisodes de l'insurrection de juin à la place de la Bastille; que j'emportais avec moi en Amérique après les avoirs exposés quelques jours dans l'atelier de Mr Le Comte de Neuvenkerke.

1849-1855
Voyage en Amérique.

Ce voyage est assurément le plus complet que jamais un artiste ait accompli dans ce pays.
Autant que possible j'ai taché de mettre à profit ce séjour de six ans; J'ai parcouru les différents états de l'Amérique.
De toutes ces études, que je puis croire unique je me réserve de faire un album.
Les grandes toiles que j'ai exécutés en Amérique sont:

1850
Une grande vue du Niagara-acheté à New York pour Lord Carlisle en Angleterre.

1851
Vue du port de la Nouvelle Orléans envoyé à l'exposition de 1853.

1855
Perspective de la principale rue de New York pendant l'hivers (effet de neige) toile de 10 pieds -admise à l'exposition universelle des beaux arts.

1856
Vue de la grande cataracte du Niagara l'hiver (dont les esquisses ont été faites en février 1855 par un froid de 18 à 20 degrés-chez moi.
L'Amérique comme on sait est un pays ou le goût des arts plus que modéré. Ce n'est point avec des toile d'intérieur et des tableaux de genres qu'un artiste peut y vivre; Je dois donc dire, pour compléter cette notice sur mes œuvres qu'il ma fallu plier mon talent au portrait. c'est donc le pastel que j'ai trouvé mon succès et ma plus grande ressource aux États Unis. les portraits que j'y ai fait y sont nombreux. J'en pourrai compter jusqu’à soixante.

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